L’entreprise peut faire l’objet d’un changement de propriétaire, notamment à la suite d’une vente / cession. Lors d’une telle opération, toutes ses ressources sont transférées simultanément au nouveau propriétaire. Cependant, une ressource parmi elles doit faire l’objet d’une attention particulière. Il s’agit ici de son capital humain, plus exactement de ses salariés. Le personnel d’une entreprise est une ressource essentielle à laquelle l’Etat a reconnu un certain nombre de prérogatives, notamment lors de la vente de l’entreprise. Alors quels sont les droits des salariés lors de la vente d’une entreprise ? Nous faisons le point dans cet article.
Sommaire :
Le droit à l’information
Le droit à l’information est introduit par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances (loi Macron). Ce texte fait obligation aux chefs d’entreprises ou employeurs d’informer préalablement leurs employés en cas de vente de l’entreprise.
Quand s’applique le droit à l’information ?
Le salarié a le droit d’être informé de la vente de l’entreprise. Ce droit s’applique quel que soit le domaine d’activité de l’entreprise et avant la réalisation de l’opération. La loi n° 2015-990 du 6 août indique les opérations devant faire l’objet d’information auprès des salariés. Il s’agit de :
- La vente de fonds de commerce (marques et noms commerciaux, etc.) ;
- La cession de la majorité ou plus de 50 % des parts sociales d’une SARL ;
- La cession d’actions ou de valeurs mobilières de la SA, la SAS ou la SCA ;
- La cession d’actions ou vente de parts sociales entre filiales d’un même groupe ou entre une filiale et sa société mère,
Deux conditions doivent être remplies pour que soit effectif le droit à l’information des salariés. L’article 18 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire prescrit l’obligation d’informer les employés lorsque ceux-ci atteignent un effectif d’au moins 250 salariés. Par ailleurs, l’entreprise (PME ou TPE) doit réaliser un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros et un bilan comptable en deçà des 43 millions d’euros.
Le non-respect du droit à l’information est passible d’une amende plafonnée à 2 % du montant de la vente.
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Quelles sont les informations concernées ?
Quelles informations doivent exactement être communiquées aux salariés lors de la vente de l’entreprise ? Le chef d’entreprise n’est tenu que de communiquer son intention de procéder à la vente de l’entreprise. Il n’est pas tenu de justifier sa décision. C’est dire en retour que les salariés ne sont pas tenus de demander les motivations ou raisons de la vente de l’entreprise. Le droit à l’information est considéré comme respecté simplement si les salariés ont été tenus informés de l’intention du chef d’entreprise de vendre la société.
Par ailleurs, et non des moindres, la communication sur le projet de vente doit être accompagnée de la possibilité de faire une offre de rachat. L’employeur doit informer les salariés de leur possibilité de racheter l’entreprise.
Tous les salariés de l’entreprise sont titulaires du droit à l’information en cas de vente de l’entreprise. Est considérée comme salarié, toute personne qui perçoit un salaire régulier dans l’entreprise, qu’il soit en exercice ou en congé (maladie, maternité, sans solde, etc.). Sont donc exclus de cette catégorie, les travailleurs intérimaires et les stagiaires.
Le droit à soumettre une offre d’achat
Le droit à soumettre une offre d’achat est une prérogative dont jouit tout employé lors de la vente de l’entreprise. L’exercice de ce droit est soumis à certaines conditions et à une procédure bien définie.
Quelles sont les conditions à remplir pour soumettre une offre d’achat ?
Pour soumettre une offre à leur employeur pour l’achat de l’entreprise, les salariés doivent observer certaines conditions. Il s’agit de :
- Un effectif minimum de 50 salariés ;
L’entreprise doit compter un effectif d’au moins 50 salariés. En deçà de ce nombre, les salariés ne pourront faire aucune offre de rachat de l’entreprise.
- La création d’une société coopérative ouvrière de production ;
Les salariés doivent créer une SCOP (société coopérative ouvrière de production) dont tous seront propriétaires simultanément.
- L’approbation de l’ensemble des salariés ;
Les salariés doivent avoir approuvé dans leur majorité le projet de reprise de l’entreprise. Pour ce faire, tous doivent avoir eu et pris connaissance du projet.
Lorsque le projet de reprise de l’entreprise par les salariés est approuvé, ceux-ci peuvent bénéficier d’un soutien et d’un accompagnement juridiques et financiers. Sans oublier certaines exonérations fiscales qui peuvent également leur être accordées pour faciliter leur projet.
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Quelle est la procédure à suivre ?
La procédure à suivre par les salariés pour faire une offre d’achat de l’entreprise de leur employeur est toute simple. Ils doivent d’abord commencer par informer l’employeur par écrit de leur volonté de présenter une offre de reprise. Une fois ceci fait, les salariés doivent élaborer un plan de financement détaillé et précis. Lorsque l’employeur reçoit le projet des salariés de racheter son entreprise, il doit l’examiner.
Il faut noter ici que les salariés disposent d’un droit de préemption par rapport aux offres de potentiels acheteurs extérieurs. L’employeur vendeur a donc l’obligation d’examiner l’offre de ses salariés avant une toute autre. Mais l’employeur propriétaire du fonds est libre de contacter ses salariés pour une négociation. C’est dire qu’il reste libre du choix de son futur acheteur.
Cependant, considérant la difficulté éventuelle de trouver un repreneur extérieur de l’entreprise, il n’est pas rare que le dirigeant opte pour l’offre de ses salariés. En effet, en transmettant son affaire à ses salariés, il opte pour un repreneur qui connaît déjà l’entreprise et son environnement. Les salariés disposent justement déjà du savoir-faire nécessaire pour poursuivre l’activité. De surcroît, l’employeur peut continuer de jouer un rôle capital après la vente de son entreprise à ses salariés. Il peut en effet leur apporter un certain nombre de conseils pour assurer la pérennité de l’activité et garantir la rentabilité de l’entreprise.
Le droit au maintien des salariés en poste
Le maintien des salariés en poste est garanti par l’article L.1224.1 du Code du Travail. Cette disposition protège les salariés d’une entreprise en cas de vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise etc. Le changement d’employeur est donc en principe sans influence sur les contrats de travail des salariés déjà en poste.
Les salariés conservent leurs emplois et leurs contrats de travail. Qu’il s’agisse de CDD, CDI, contrat à temps partiel ou à temps plein, contrat de VRP, contrat aidé, congé parental d’éducation, congé maladie, etc. Le droit au maintien des salariés s’applique sous certaines conditions, et selon les éléments transférés au nouvel employeur.
Dans quelles conditions s’applique le droit au maintien des salariés ?
Les conditions à remplir pour que soient maintenus les droits des salariés sont les suivantes :
- La conservation de l’identité de l’entreprise
La reprise de l’entreprise ne doit pas se faire sous une autre entité. C’est dire qu’il doit s’agir de la même entité qui a conservé son identité.
- La poursuite de la même activité
L’entreprise reprise doit poursuivre la même activité sous le nouvel exploitant, ou tout au moins une activité connexe ou similaire. Le but de cette condition est de permettre aux salariés de maintenir leurs emplois sans changements majeurs dans les procédés de fabrication ou de commercialisation.
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Quels éléments sont transférés au nouvel employeur
Le nouvel employeur qui reprend l’affaire reprend également les contrats de travail des salariés. De ce fait, ceux-ci concernent acquis suivants :
- L’ancienneté ;
- La qualification ;
- La rémunération ;
- Autres avantages (clause de mobilité, clause de non concurrence, voiture de fonction, logement, etc.).
Il faudrait noter que le nouvel employeur peut proposer une modification d’un contrat de travail. Toutefois, il doit absolument avoir l’accord préalable du salarié concerné et respecter la réglementation. De surcroît, il faudrait ajouter que le salarié dont le contrat de travail a été rompu par une démission ou parce qu’il a été licencié avant le changement de situation ne peut pas bénéficier d’un transfert de son contrat de travail vers le nouvel employeur.
Par ailleurs, le nouvel employeur ne peut s’opposer au transfert d’un salarié. Cela est assimilable à un licenciement de fait. Le salarié pourra alors prétendre à des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse. En retour, le salarié ne peut s’opposer au transfert de son contrat de travail dans les mêmes termes. Cela est assimilable à une démission. Il ne pourra alors prétendre à aucune indemnité.
En somme, les droits des salariés lors de la vente de l’entreprise sont garantis par la loi. L’ancien employeur tout comme le nouveau sont tenus de les respecter, à défaut de tomber sous le coup de la loi.